C’est plutôt rare qu’on associe la protection de la biodiversité à la santé. Pourtant, la préservation de la biodiversité est essentielle à la vie humaine. Toute menace à la biodiversité — que ce soit la destruction des milieux naturels, les changements climatiques ou bien encore la pollution de l’air, des sols et de l’eau — peut consister en une menace directe ou indirecte à la santé humaine.
Voilà une bonne raison de s’intéresser aux discussions entourant la COP15 qui se déroule à Montréal. Cette conférence se penche plus spécifiquement sur la création d’un cadre de travail visant à stopper le déclin de la biodiversité dans le monde. Cela s’aligne avec l’objectif ultime de la Convention sur la diversité biologique de vivre en harmonie avec la nature d’ici 20501 — objectif certes ambitieux, mais qui doit réussir à s’imposer dans nos modes de vie et de gouvernance.
De plus en plus de chercheurs et de scientifiques se questionnent sur les liens entre la biodiversité et la santé humaine. Les constats sont plutôt effrayants : plus la biodiversité est mise à mal, plus les risques pour la santé humaine augmentent, principalement les risques d’émergence et de propagation de maladies infectieuses, dont certaines encore inconnues de la science.
Instinctivement, la faune sauvage est souvent perçue comme une réserve potentielle d’infections de toutes sortes, de laquelle il faut mieux se protéger en déployant des mesures d’assainissement ou d’éradication.
Toutefois, l’expérience terrain démontre autre chose. Lorsqu’on bouscule l’équilibre d’un milieu, par exemple, en y retirant une ou des espèces, le milieu s’affaiblit.
Les chercheurs ont appelé ça « l’effet de dilution »2. Ça se résume ainsi : une riche biodiversité a un effet régulateur sur la prévalence, la transmission et la virulence des pathogènes. Pour le dire autrement : plus il y a d’espèces vivantes, autant en nombre qu’en variété, plus la probabilité qu’un agent pathogène, potentiellement dangereux, se transmette à l’humain ou à ses animaux domestiques diminue.
Le constat se transpose du côté des forêts, des milieux naturels et des cultures agricoles : plus ces milieux sont variés, mieux ils résistent aux différentes perturbations et invasions. La diversité d’un milieu donné fait donc sa force, sa solidité, sa résilience.
Curieusement, ça semble aussi être le cas pour les humains. Le contact avec un milieu naturel, riche et diversifié, semble enrichir le microbiome humain (l’ensemble des micro-organismes qui peuplent notre corps), favorisant l’équilibre immunitaire. Il s’agit de l’hypothèse de la biodiversité, qui a été étudiée de façon plutôt convaincante dans le nord de la Finlande.3
On peut le résumer ainsi : notre santé est foncièrement dépendante des écosystèmes et des différentes formes de vie qu’ils hébergent. En les détruisant et en perturbant le fonctionnement du vivant, nous nous mettons en danger.
Il devient donc impératif de veiller à la préservation de la biodiversité et à sa priorisation dans les orientations politiques.
Dans l’introduction de la déclaration finale de la COP27 sur le climat qui vient tout juste de se terminer en Égypte, les gouvernements — dont celui du Canada — ont reconnu le droit à la santé ainsi que le droit de vivre dans un environnement sain et durable.
Par souci de cohérence, la COP15 doit emboîter le pas et offrir des moyens concrets pour arrêter le déclin de la biodiversité et ainsi honorer le droit à la santé. Les acteurs gouvernementaux qui y prennent part doivent absolument garder en tête que leurs décisions auront des impacts considérables sur la santé des 8 milliards d’humains qui cohabitent sur la Terre.
Alors que nous peinons à nous relever de la pandémie de la COVID-19 et de l’effet tsunami sur notre réseau de la santé, offrons-nous le beau cadeau d’ouvrir le dialogue sur l’importance de la biodiversité pour la santé humaine.
1. Consultez le site de la Convention sur la diversité biologique
3. Lisez le texte : « A biodiversity hypothesis » (en anglais)
Source: La Presse